Comme vous pourrez le lire si vous creusez dans les abyssales profondeurs de ce blog, j'avais pris à son ouverture la résolution d'être régulier. Comme à ma triste habitude, cette belle décision aura duré le temps de la formuler, et guère plus, mais tenaillé par les scrupules j'ai néanmoins pris soin de noter les sujets que je souhaitais aborder.
J'avais par exemple noté dans un style sibyllin mais pertinent le thème suivant : "effectif police sécuritaire tarnac".
J'aurais pu publier la note telle quelle, ça vous aurait changé de ma loghorrée et elle se suffit à elle-même, mais où serait le plaisir ? Donc je développe.
D'abord, je voulais réagir à l'annonce de Brice Hortefeux de l'augmentation, prévue, des effectifs policiers en 2010. A l'heure où l'on dégraisse à tour de bras dans l'éducation, la justice ou la santé, j'avais trouvé là une fort belle occasion de vomir (voluptueusement) ma bile. Las, la lecture du Canard Enchainé de la semaine suivante m'apprenait qu'en réalité ces chiffres étaient bidon, et qu'ils ne tenaient compte ni de la transformation d'emplois en contrats précaires, ni des départs à retraite, et que soustraction faite, les effectifs baissaient.
Impossible donc de pérorer sur ce gouvernement qui privilégie financièrement le flic à l'instituteur. On pourrait en revanche largement s'étendre sur les raisons qui poussent nos ministres à bluffer sur la hausse du nombre de policiers tandis qu'ils revendiquent haut et fort les baisses d'effectif dans d'autres secteurs publics (cf ci-dessus).
Ensuite, je voulais réagir à cet article sur un blog sympathique (quoiqu'honteusement gauchiste) parce qu'il reprend la déclaration d'un syndicat de la police nationale (Alliance) qui me semble tout à fait édifiant.
Pour ceux qui ont la flemme de lire, il s'agit d'une réaction syndicaliste à la condamnation de deux policiers de La Courneuve, mis en examen pour violences lors des émeutes de 2005 où ils avaient été filmés en train de maraver du sauvageon. Condamnés à des peines équivalentes à deux emplois fictifs à la mairie de Paris (prison avec sursis + un an de suspension), ils ont bénéficié du soutien du syndicat susnommé par la voix d'un de ses membres, qui explique que certes, ce sont des violences, mais commises dans un climat de violence, donc bon, hein, on est tous humain n'est-ce pas, et qui termine par assurer que c'est avec ce genre de décisions qu'on démotive la police.
Je ne blâme pas ce monsieur, il est dans son rôle de défenseur de la corporation policière, même s'il est un peu triste que son analyse se limite à un (triste) constat au lieu d'identifier les causes profondes de cette violence. On pourrait certes trouver à redire sur l'idée que la police n'est motivée que tant que sa violence n'est pas contrôlé, mais je pense que l'important est ailleurs. Et, par exemple, dans le fait que le métier de policier se voit réduit au rôle suivant : répondre à la violence par la violence, ou plutôt répondre par la violence légitime à la violence criminelle, comme si elles étaient toutes deux de même nature.
On constatera d'ailleurs que c'est assez systématiquement le discours des policiers accusés de violences : c'est pas eux qui ont commencé. Comme s'il était normal que le flic réplique au délinquant (et, par égard pour notre belle institution policière, j'occulte les cas où le délinquant s'avère être un simple quidam un peu bronzé qui passait par là) comme deux gamins règlent leurs comptes dans une cour de récré.
On ne manque pas de périphrases pour désigner nos braves keufs : protection civile, maintien de l'ordre, représentans de l'ordre, personne ne modère ses efforts pour les habiller de lumière et de solennité, ce qui me semble cohérent avec la volonté de s'éloigner des logiques tribalo-miliciennes qui hantent nos JT et notre récent passé. La police n'est pas un faisceau ou un groupe d'auto-défense, elle est investit par l'Etat de la légitimité de la violence, et ce n'est pas un chèque en blanc. Elle doit en échange, elle DEVRAIT en échange disposer d'une maitrise et d'une modération dans cette violence qui justifie qu'elle en soit le dépositaire. En bref, que la violence soit à tout moment et en tout lieu un dernier recours, une extremité à laquelle aucun de ses membres n'aspire.
Ca, c'est pour le monde des bisounours. Dans la vraie vie, le policier est précaire, sous-formé, chauffé à blanc par des discours sécuritaires bourrés d'amalgames et de raccourcis, mis sous pression par une politique du chiffre diamétralement opposée à l'action réfléchie qui devrait être sa règle. Et ça ne va pas en s'arrangeant, si l'on en croit l'Hortefade citée un peu plus haut. Alors qu'une police civilisée, progressiste (non, je ne cherche pas l'oxymore provocatrice) devrait être composée d'éléments expérimentés et doués de recul sur leur propre rôle, on se dirige vers une foule de troufions incultes et violents qui cèdent aux mêmes pulsions que ceux qu'ils doivent contrôler et/ou protéger. Et qui masque ses propres insuffisances par le déni et la manipulation (les policiers condamnés pour les violences de La Courneuve le sont aussi pour faux en écriture).
Il me semble donc qu'à chercher ce qui pourrait démotiver la police de Seine-Saint-Denis, on puisse trouver plus grave et plus pertinent qu'une juste condamnation pour passage à tabac.
Enfin, et ce sera l'épilogue de cet article fleuve, je voulais revenir sur cette phénoménale affaire de Tarnac, qui si elle était baudruche serait en train de se gonfler "à l'envers". Après la phase de dégonflage, où nous passâmes du démantèlement d'un réseau terroriste à la simple garde-à-vue d'un couple vaguement anarchiste accusé de pas grand chose, les preuves abondent d'une grossière et pitoyable manipulation policière : les témoignages sont remis en cause, les pièces à conviction falsifiées, le savant édifice de cette affaire en carton branle de toutes parts.
Question : après s'être passionnés pour la sourde menace de l'ultra-gauche, puis pour le sort de Julien Coupat-l'intellectuel emprisonné, les médias daigneront-ils s'intéressés à la machine policière dans ce qu'elle a de plus kafkaïen, et dissèqueront-ils les rouages (et les responsabilités) de ce qu'on peut probablement qualifier de machination à l'encontre d'innocents politisés ?
Rien n'est moins sûr, évidemment.
J'avais par exemple noté dans un style sibyllin mais pertinent le thème suivant : "effectif police sécuritaire tarnac".
J'aurais pu publier la note telle quelle, ça vous aurait changé de ma loghorrée et elle se suffit à elle-même, mais où serait le plaisir ? Donc je développe.
D'abord, je voulais réagir à l'annonce de Brice Hortefeux de l'augmentation, prévue, des effectifs policiers en 2010. A l'heure où l'on dégraisse à tour de bras dans l'éducation, la justice ou la santé, j'avais trouvé là une fort belle occasion de vomir (voluptueusement) ma bile. Las, la lecture du Canard Enchainé de la semaine suivante m'apprenait qu'en réalité ces chiffres étaient bidon, et qu'ils ne tenaient compte ni de la transformation d'emplois en contrats précaires, ni des départs à retraite, et que soustraction faite, les effectifs baissaient.
Impossible donc de pérorer sur ce gouvernement qui privilégie financièrement le flic à l'instituteur. On pourrait en revanche largement s'étendre sur les raisons qui poussent nos ministres à bluffer sur la hausse du nombre de policiers tandis qu'ils revendiquent haut et fort les baisses d'effectif dans d'autres secteurs publics (cf ci-dessus).
Ensuite, je voulais réagir à cet article sur un blog sympathique (quoiqu'honteusement gauchiste) parce qu'il reprend la déclaration d'un syndicat de la police nationale (Alliance) qui me semble tout à fait édifiant.
Pour ceux qui ont la flemme de lire, il s'agit d'une réaction syndicaliste à la condamnation de deux policiers de La Courneuve, mis en examen pour violences lors des émeutes de 2005 où ils avaient été filmés en train de maraver du sauvageon. Condamnés à des peines équivalentes à deux emplois fictifs à la mairie de Paris (prison avec sursis + un an de suspension), ils ont bénéficié du soutien du syndicat susnommé par la voix d'un de ses membres, qui explique que certes, ce sont des violences, mais commises dans un climat de violence, donc bon, hein, on est tous humain n'est-ce pas, et qui termine par assurer que c'est avec ce genre de décisions qu'on démotive la police.
Je ne blâme pas ce monsieur, il est dans son rôle de défenseur de la corporation policière, même s'il est un peu triste que son analyse se limite à un (triste) constat au lieu d'identifier les causes profondes de cette violence. On pourrait certes trouver à redire sur l'idée que la police n'est motivée que tant que sa violence n'est pas contrôlé, mais je pense que l'important est ailleurs. Et, par exemple, dans le fait que le métier de policier se voit réduit au rôle suivant : répondre à la violence par la violence, ou plutôt répondre par la violence légitime à la violence criminelle, comme si elles étaient toutes deux de même nature.
On constatera d'ailleurs que c'est assez systématiquement le discours des policiers accusés de violences : c'est pas eux qui ont commencé. Comme s'il était normal que le flic réplique au délinquant (et, par égard pour notre belle institution policière, j'occulte les cas où le délinquant s'avère être un simple quidam un peu bronzé qui passait par là) comme deux gamins règlent leurs comptes dans une cour de récré.
On ne manque pas de périphrases pour désigner nos braves keufs : protection civile, maintien de l'ordre, représentans de l'ordre, personne ne modère ses efforts pour les habiller de lumière et de solennité, ce qui me semble cohérent avec la volonté de s'éloigner des logiques tribalo-miliciennes qui hantent nos JT et notre récent passé. La police n'est pas un faisceau ou un groupe d'auto-défense, elle est investit par l'Etat de la légitimité de la violence, et ce n'est pas un chèque en blanc. Elle doit en échange, elle DEVRAIT en échange disposer d'une maitrise et d'une modération dans cette violence qui justifie qu'elle en soit le dépositaire. En bref, que la violence soit à tout moment et en tout lieu un dernier recours, une extremité à laquelle aucun de ses membres n'aspire.
Ca, c'est pour le monde des bisounours. Dans la vraie vie, le policier est précaire, sous-formé, chauffé à blanc par des discours sécuritaires bourrés d'amalgames et de raccourcis, mis sous pression par une politique du chiffre diamétralement opposée à l'action réfléchie qui devrait être sa règle. Et ça ne va pas en s'arrangeant, si l'on en croit l'Hortefade citée un peu plus haut. Alors qu'une police civilisée, progressiste (non, je ne cherche pas l'oxymore provocatrice) devrait être composée d'éléments expérimentés et doués de recul sur leur propre rôle, on se dirige vers une foule de troufions incultes et violents qui cèdent aux mêmes pulsions que ceux qu'ils doivent contrôler et/ou protéger. Et qui masque ses propres insuffisances par le déni et la manipulation (les policiers condamnés pour les violences de La Courneuve le sont aussi pour faux en écriture).
Il me semble donc qu'à chercher ce qui pourrait démotiver la police de Seine-Saint-Denis, on puisse trouver plus grave et plus pertinent qu'une juste condamnation pour passage à tabac.
Enfin, et ce sera l'épilogue de cet article fleuve, je voulais revenir sur cette phénoménale affaire de Tarnac, qui si elle était baudruche serait en train de se gonfler "à l'envers". Après la phase de dégonflage, où nous passâmes du démantèlement d'un réseau terroriste à la simple garde-à-vue d'un couple vaguement anarchiste accusé de pas grand chose, les preuves abondent d'une grossière et pitoyable manipulation policière : les témoignages sont remis en cause, les pièces à conviction falsifiées, le savant édifice de cette affaire en carton branle de toutes parts.
Question : après s'être passionnés pour la sourde menace de l'ultra-gauche, puis pour le sort de Julien Coupat-l'intellectuel emprisonné, les médias daigneront-ils s'intéressés à la machine policière dans ce qu'elle a de plus kafkaïen, et dissèqueront-ils les rouages (et les responsabilités) de ce qu'on peut probablement qualifier de machination à l'encontre d'innocents politisés ?
Rien n'est moins sûr, évidemment.
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