Vous connaissez le supplice de Tantale ? C'est l'histoire d'un mec qui avait, aux temps antiques d'avant l'Antiquité officielle, quelques petits trucs à se reprocher, et s'était vu punir par les Dieux de l'Olympe qui versaient alors assez peu dans la magnanimité et l'assistanat. Et comme en ce temps là on punissait avec élégance et originalité, tout l'inverse de cette époque aseptisée où on n'a même plus le droit de sodomiser les détenus avec des AK47, il fut condamné à passer l'éternité dans le Tartare (ni le désert, ni le steak, juste un étage des Enfers héllènes) avec à portée de mains un arbre gorgé de fruits mais dont les branches s'éloignaient chaque fois qu'il tendait la main pour les saisir, et une rivière à l'onde fraîche et limpide dont le niveau baissait chaque fois qu'il se penchait pour y boire. Autant vous dire qu'il n'a pas passé une très bonne éternité.
Ma position quant au débat sur l'identité nationale est sensiblement la même que celle de Tantale et de son putain d'arbre : j'ai envie d'en cueillir les marrons pour les commenter d'abondance, mais cela m'est refusé par la pénible conscience d'être un mouton guidé par son pâtre sur les chemins herbus de la débilité. Plus clairement : j'ai pas envie de faire plaisir à l'UMP en ventilant à mon tour l'écran de fumée qu'elle diffuse autour des vrais sujets.
MAIS DES FOIS C'EST DUR.
Par exemple, quand Eric Besson déclare (sur Europe 1), réagissant aux propos foireux d'un maire aviné ("y en a déjà dix millions qu'on paie à rien foutre"), que les "réflexions de comptoir" font aussi "partie de l'identité nationale", j'ai plein d'endroits qui me démangent, et pas seulement là où je pense. De deux choses l'une : soit Eric Besson croit ce qu'il dit, et c'est une insulte absolue crachée à nos visages de citoyens français, soit Eric Besson ne croit pas ce qu'il dit, et c'est une pirouette pour légitimer qu'on dise absolument n'importe quoi dans le cadre du "débat" qu'il a lui-même initié et dont il a parait-il fixé des règles strictes.
Dans les deux cas, il ne pousse pas le foutage de gueule jusqu'à feindre la surprise comme d'autres ici ou là ("à droite à gauche" se prêtait mal aux circonstances), du genre "Quoi, mais comment se fait-ce, il y aurait des dérapages racistes à l'intérieur de notre débat qui n'a rien à voir puisqu'il se penche sur l'identité nationale et qu'on a jamais dit que les noirs et les arabes ils étaient pas nationaux aussi".
Phase 1 : je lie (avec pour ficelle un ministère) immigration et identité nationale.
Phase 2 : je lance un débat sur l'identité nationale.
Phase 3 : je m'étonne que le débat porte sur l'immigration. Implacable.
Bon, telle une vierge farouche résistant aux avances libidineuses de bergers en rut, je m'étais promis de ne pas m'étendre, j'en reste donc là : la manoeuvre est grossière, le panneau béant, et ceux qui tombent dedans doivent bien le choisir un peu.
Je terminerai en mentionnant un article lu dans l'irremplaçable Monde Diplomatique qui évoquait les travaux d'Ernest Renan. Ce socio-philosophe du XIXème, qui naviguait avec un bonheur discutable au milieu des thèses racistes de l'époque, darwiniste mais ardent défenseur de la colonisation, chantre des races supérieures/inférieures (cruel portrait, à remettre en perspective avec l'époque, néanmoins), nous a légué l'idée suivante : la nation et la race sont deux notions concurrentes. La construction d'une nation passe donc nécessairement par la négation des races, par leur "dissipation" dans le creuset national. Appartenir à la nation, c'est "la possession en commun d’un riche legs de souvenirs" et surtout "le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis".
Wikipédia mentionne d'ailleurs un extrait évocateur de son "Qu'est-ce-qu'une nation ?"
Un texte dont l'écho nous revient par Hamé, rappeur de son état, auteur d'une superbe tribune dans les colonnes du Monde, et qui exprime mon point de vue avec une concision dont je suis bien incapable : Etre français, c'est avoir sa vie en France et rien de plus.
Fermez le ban.
Ma position quant au débat sur l'identité nationale est sensiblement la même que celle de Tantale et de son putain d'arbre : j'ai envie d'en cueillir les marrons pour les commenter d'abondance, mais cela m'est refusé par la pénible conscience d'être un mouton guidé par son pâtre sur les chemins herbus de la débilité. Plus clairement : j'ai pas envie de faire plaisir à l'UMP en ventilant à mon tour l'écran de fumée qu'elle diffuse autour des vrais sujets.
MAIS DES FOIS C'EST DUR.
Par exemple, quand Eric Besson déclare (sur Europe 1), réagissant aux propos foireux d'un maire aviné ("y en a déjà dix millions qu'on paie à rien foutre"), que les "réflexions de comptoir" font aussi "partie de l'identité nationale", j'ai plein d'endroits qui me démangent, et pas seulement là où je pense. De deux choses l'une : soit Eric Besson croit ce qu'il dit, et c'est une insulte absolue crachée à nos visages de citoyens français, soit Eric Besson ne croit pas ce qu'il dit, et c'est une pirouette pour légitimer qu'on dise absolument n'importe quoi dans le cadre du "débat" qu'il a lui-même initié et dont il a parait-il fixé des règles strictes.
Dans les deux cas, il ne pousse pas le foutage de gueule jusqu'à feindre la surprise comme d'autres ici ou là ("à droite à gauche" se prêtait mal aux circonstances), du genre "Quoi, mais comment se fait-ce, il y aurait des dérapages racistes à l'intérieur de notre débat qui n'a rien à voir puisqu'il se penche sur l'identité nationale et qu'on a jamais dit que les noirs et les arabes ils étaient pas nationaux aussi".
Phase 1 : je lie (avec pour ficelle un ministère) immigration et identité nationale.
Phase 2 : je lance un débat sur l'identité nationale.
Phase 3 : je m'étonne que le débat porte sur l'immigration. Implacable.
Bon, telle une vierge farouche résistant aux avances libidineuses de bergers en rut, je m'étais promis de ne pas m'étendre, j'en reste donc là : la manoeuvre est grossière, le panneau béant, et ceux qui tombent dedans doivent bien le choisir un peu.
Je terminerai en mentionnant un article lu dans l'irremplaçable Monde Diplomatique qui évoquait les travaux d'Ernest Renan. Ce socio-philosophe du XIXème, qui naviguait avec un bonheur discutable au milieu des thèses racistes de l'époque, darwiniste mais ardent défenseur de la colonisation, chantre des races supérieures/inférieures (cruel portrait, à remettre en perspective avec l'époque, néanmoins), nous a légué l'idée suivante : la nation et la race sont deux notions concurrentes. La construction d'une nation passe donc nécessairement par la négation des races, par leur "dissipation" dans le creuset national. Appartenir à la nation, c'est "la possession en commun d’un riche legs de souvenirs" et surtout "le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis".
Wikipédia mentionne d'ailleurs un extrait évocateur de son "Qu'est-ce-qu'une nation ?"
La vérité est qu'il n'y a pas de race pure et que faire reposer la politique sur l'analyse ethnographique, c'est la faire porter sur une chimère. Les plus nobles pays, l'Angleterre, la France, l'Italie, sont ceux où le sang est le plus mêlé. L'Allemagne fait-elle à cet égard une exception ? Est-elle un pays germanique pur ? Quelle illusion ! Tout le Sud a été gaulois. Tout l'Est, à partir d'Elbe, est slave. Et les parties que l'on prétend réellement pures le sont-elles en effet ? Nous touchons ici à un des problèmes sur lesquels il importe le plus de se faire des idées claires et de prévenir les malentendus
Un texte dont l'écho nous revient par Hamé, rappeur de son état, auteur d'une superbe tribune dans les colonnes du Monde, et qui exprime mon point de vue avec une concision dont je suis bien incapable : Etre français, c'est avoir sa vie en France et rien de plus.
Fermez le ban.
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Regarde-toi dans une glace et fais comme elle : réfléchis.