jeudi 24 décembre 2009

[SANTACLAF] Rémunérons et agrippa

Attention, article de droite.

Ce matin, c'est la voix, douce et frémissante d'exaltation, d'Henri Guaino qui m'a tiré par la manche du sommeil et du lit. Après avoir répondu à un auditeur sur son adéquation idéologique avec les principes du Conseil National de la Résistance (mise en doute par l'auditeur, revendiquée par Guaino), le scribe sarkozyste expliquait qu'ils (Sarko et lui) avaient fait du bien à la France en remettant le mérite et la valeur du travail au goût du jour. Ca m'a donné envie d'en remettre une couche sur "le mérite" tel que défini par nos amis de l'UMP, et je m'apprêtais à me lancer dans une tribune énervée sur la vilaine manipulation qui entoure ce terme quand, soudain, hop, éclair d'intelligence.

Je laisse un peu plâner le suspense sur la nature dudit éclair, ils sont si rares que tu me pardonneras lecteur d'en profiter un peu, mais la probité m'oblige à signaler que la lecture d'un article de Gauche Libérale (j'y reviendrai non, en fait) n'y est pas étrangère. Intitulé "La Justice Sociale", ce dernier s'opposait au terme employé par les partis de gauche, en expliquant qu'user du mot "justice" impliquait qu'il y ait crime préalable. Ils en venaient à la conclusion que la revendication d'une justice sociale revenait à criminaliser tout profit, ce qui est mal. Je ne suis pas d'accord avec ce sophisme, mais la proposition initiale a le mérite de poser une bonne question : qu'est-il juste de gagner ? Sur quelles bases et pourquoi doit ou peut-on percevoir de l'argent, et de qui ?

Plutôt que de m'embarquer dans une diatribe anti-mérite, j'ai donc décidé de réfléchir et de te soumettre, lecteur, ma conception de la"Justice Sociale", ou plus exactement, de poser cette question : Que doit-on rémunérer ? Et pourquoi ?

(dans les paragraphes ci-dessous, je choisis de considérer qu'en toutes circonstances c'est "la société" qui allonge la maille, celle-ci ayant le bon goût de regrouper l'Etat, le particulier et l'entreprise privée en un seul et même gros bordel)

D'aucuns diront le travail, et je reconnais hardis lecteurs que ça roule de bon sens. Mais une telle affirmation demande de définir le travail, et si vous voulez vous embarquer dans l'article le plus long de l'histoire de la blogosphère, c'est une excellente direction. N'ayant pas le courage de vous y suivre, je vous propose de contourner l'obstacle de la définition en substituant au pénible "travail" le plus simple "effort", au sens de "l'action énergique d'une force physique ou intellectuelle". Premier écueil néanmoins : on perçoit facilement que tout effort défini ainsi n'est et ne peut être financé. Je respire ? Je me gratte ? Je mâche négligemment le bout de mon stylo ? Voilà des efforts que le pire des socialistes ne voudrait voir rémunérer.

Il nous faut donc catégoriser les efforts pour distinguer ceux qui méritent, et ceux qui ne méritent pas. On met ici le doigt sur le vaste problème de nos amis sarkozystes, qui nous servent le mérite républicain à toutes les sauces et toutes les occasions : jamais ils ne s'attachent à expliquer ce qu'il recouvre. Nous y reviendrons, mais pour l'instant cherchons ce qui peut discriminer l'effort rémunérable de l'effort osef. Je propose, puisque c'est la société qui paie, que ne soit payé que l'effort qui lui est utile. Ce qui reviendrait à dire : la société rémunère tout effort qui lui est utile.

Qu'est ce qui est utile à la société ? Vous faîtes un peu chier à tout compliquer. Ce qui est utile à la société, c'est ce qui l'élève de manière globale ou infinitésimale. Le premier qui me demande de définir "l'élévation de la société" est invité à retourner pontifier dans ces bouquins du rayon sciences humaines de la FNAC où il n'y a jamais d'images.

Bien. Donc il est légitime de rémunérer tout effort qui permet l'élévation de la société. Nonobstant les raccourcis philosophiques et les biais idéologiques, il me semble que cette définition pourrait être partagée par tous. Si tel n'était pas le cas, ce serait quand même pas de bol d'avoir comme unique lecteur un schizophrène.

Dotés d'une définition générique et consensuelle, reste alors à parler proportions. J'étonnerai certainement les plus imbéciles de mes lecteurs (coucou le schizo), mais bien que gauchiste revendiqué, je ne milite pas pour l'instauration d'une égale rémunération pour tous. Je trouve légitime et souhaitable que le salaire d'un individu soit proportionnel aux efforts fournis et à leur utilité sociale.

Nous nous trouvons ainsi sur une grille à deux axes : l'effort (qui regroupe comme dit plus haut l'effort intellectuel, l'effort physique, mais aussi la prise de risque) et l'utilité sociale.

Nous pouvons nous amuser à situer sur un ce référentiel différents individus : de l'entrepreneur à l'actionnaire (chers à nos dirigeants), ou du prof d'histoire géo au chômeur longue durée (nettement moins chers à nos dirigeants).
(voir fin de l'article)

Trois remarques :

D'abord, les évaluations respectives de l'effort fourni par chacun et de l'utilité sociale de chacun sont bien évidemment soumises à de nombreux biais idéologiques. Certains souhaiteront identifier l'utilité sociale à la performance économique, d'autres (souvent les mêmes) pondéreront fortement la prise de risque dans l'effort fourni. Encore faut-il assumer et justifier ces choix pour le moins discutables.

Ensuite, se présente le cas, en supposant qu'il existe, des individus situés à l'origine du repère (effort nul, utilité sociale nulle). Je crois pour ma part impossible un tel cas de figure (même le plus marginalisé des SDF est utile socialement, ne serait-ce qu'auprès de ses congénères) mais il n'est pas incohérent dans un référentiel comme celui décrit dans le paragraphe d'au-dessus. Considérer alors que leur rémunération doit être nulle me semble moralement discutable. Il existe donc une rémunération minimale, perçue par tous, à laquelle s'additionne la rémunération des efforts et de l'utilité sociale sus-évoqués : c'est le minimum social.

Enfin, et cela demanderait au moins autant de temps pour le développer, la rémunération ne prend pas nécessairement la forme sonnante et trébuchante de l'argent. La reconnaissance sociale (le "statut"), le capital culturel, etc...sont autant de rémunérations difficiles à évaluer mais qu'il est indispensable de prendre en compte pour mesurer les rémunérations respectives des uns et des autres.

Car, et ce sera ma conclusion, si chacun perçoit une rémunération à la hauteur de son effort social, il est important pour maintenir la cohésion et la "justice" (on y revient) de l'ensemble que les écarts de rémunération entre individus restent maintenus dans des proportions humainement concevables. Parce personne n'est infiniment plus utile à la société que son prochain, et parce que finalement cette (modeste) analyse reste purement comptable, c'est à dire bien loin de l'essentiel.

Car, et ce sera ma conclusion (cette fois c'est la bonne, promis), c'est finalement assez laborieux de réfléchir sérieusement à d'aussi vastes problèmes, et mieux vaut finir par une pirouette que par un point final.

Bonus : mon référentiel.


(quelle provoc' ?)

mercredi 23 décembre 2009

[Top 2009] Les albums

Au printemps, les primevères. En été, les jeunes filles. En automne, les dossiers "immobilier" sur les unes des hebdomadaires . En fin d'année, ce sont les top et les bilans qui fleurissent. Cédant à la frénésie ambiante, j'ai à mon tour décidé de me livrer à ce bien vain exercice, et dresser la liste des oeuvres musicales, cinématographiques et vidéoludiques qui auront marqué mes douze derniers mois.

Précaution liminaire : ces bilans ne sont pas spécifiquement qualitatifs, ils mentionnent les disques, films, jeux et livres que je retiens de cette année. Pas nécessairement les meilleurs.

Précaution liminaire 2 : je ne mentionne aucun livre, non que je n'ai lu, mais parce que mes lectures sont totalement décorellées des sorties littéraires. Je ne crois pas avoir lu plus de deux livres sortis cette année.

Pour commencer, l'exercice le plus couru : la liste des 15 albums qui auront hanté mon iPod depuis le 31 décembre 2008.

(l'effrayant espace blanc ci-dessous est bien sûr involontaire, et essentiellement dû au fait que je suis une pipe intersidérale en HTML, sur blogger ou ailleurs)































01.Arctic Monkeys - Humbug
02.The Noisettes - Wild Young Hearts
03.Metric - Fantasies
04.Beirut - March Of The Zapotec/Holland EP
05.Phoenix - Wolfgang Amadeus Phoenix
06.Weezer - Raditude
07.Regina Spektor - Far
08.Fever Ray - Fever Ray
09.Andrew Bird - Noble Beast
10.La Roux - La Roux
11.Mos Def - The Ecstatic
12.The Raveonettes - In and Out of Control
13.Why - Eskimo Snow
14.Lily Allen - It's Not Me, It's You
15.Ebony Bones - Bone of My Bones

Commentaires à venir quand j'aurai moins la flemme.

mardi 15 décembre 2009

[Humeur] Morano, meuf relou

A l'heure qu'il est, la nouvelle essaime sur les blogs et journaux en ligne plus vite qu'un lip-dub des jeunes pop', mais j'estime nécessaire d'apporter ma modeste pierre à l'édifice qui, un jour, je l'espère, lui retombera sur la gueule pour lui réduire les maxillaires en charpie au point qu'à côté, le sourire de Berlusconi ce sera celui de Miss France : Nadine Morano a commis aujourd'hui l'une des citations les plus ouvertement décomplexées de l'histoire du sarkozysme, qui n'en manque pourtant pas.

Invitée à un débat sur l'identité nationale dans les Vosges (et plus précisément dans la ville de Charmes, en hommage à Maurice Barrès), la secrétaire d'état à la Famille et à la Solidarité a déclaré, ouvrez les guillemets avec vos combinaisons anti-radiations :

Moi, ce que je veux du jeune musulman, quand il est français, c’est qu’il aime son pays, c’est qu’il trouve un travail, c’est qu’il ne parle pas le verlan, qu’il ne mette pas sa casquette à l’envers

C'est superbe. Trouver une telle harmonie entre la stigmatisation de l'Islam et celles des jeunes de banlieue demande une expérience et un talent considérables. Car outre l'imbécile confusion entre un musulman et un wesh-wesh (qui se distingue de l'arabe par le fait que lui, même quand il n'y en a qu'un, ça fait des problèmes), l'idée que parler verlan ou mettre une casquette à l'envers serait contraire aux fondamentaux de l'identité nationale est d'une profonde, profonde, profonde bêtise. Imaginer qu'il existe une version canonique et immuable du parler populaire (qu'est le verlan, comme avant lui l'argot, le patois, le louchébem, etc...) qui serait partagée par tous et pour toujours, c'est crédible quand on lit le Figaro ou Finkielkraut, mais quand on a étudié Rabelais en troisième, on a déjà les armes pour démonter cette vision sépia-moisie de la langue française, qui dans la bouche du peuple est et sera toujours mouvante. Une langue ça bouge, et pas uniquement pour dire des conneries lors de débats décomplexés.

Je passe sur le port de la casquette à l'envers comme symbole de l'anti-nationalisme, si vous me le permettez.

Maintenant, je veux bien que la blondasse qui a commis cette bouse soit logée à la même enseigne que le préfet qui voyait l'Afrique à Roissy. A moins que les auvergnats ne viennent une nouvelle fois au secours des racistes institutionnels.

mardi 8 décembre 2009

[Polésie] Complainte du benoist de Radon

Prends un train vers la pluie
Prends un coffre sur la tête
Prends ton joli survet'

Au matin nous irons
Cueillir des champignons
Et fumer des pétards

Ou bien jouer au foot
Dans la boue, sous les gouttes
Et fumer des pétards

On mangera des trucs bons
Pour finir tard le soir
Par fumer des pétards

Et à l'heure du départ
Nous irons à la gare
Pour fumer un pétard
D'au revoir.

vendredi 4 décembre 2009

[SANTACLAF] Identité naze et nulle

Vous connaissez le supplice de Tantale ? C'est l'histoire d'un mec qui avait, aux temps antiques d'avant l'Antiquité officielle, quelques petits trucs à se reprocher, et s'était vu punir par les Dieux de l'Olympe qui versaient alors assez peu dans la magnanimité et l'assistanat. Et comme en ce temps là on punissait avec élégance et originalité, tout l'inverse de cette époque aseptisée où on n'a même plus le droit de sodomiser les détenus avec des AK47, il fut condamné à passer l'éternité dans le Tartare (ni le désert, ni le steak, juste un étage des Enfers héllènes) avec à portée de mains un arbre gorgé de fruits mais dont les branches s'éloignaient chaque fois qu'il tendait la main pour les saisir, et une rivière à l'onde fraîche et limpide dont le niveau baissait chaque fois qu'il se penchait pour y boire. Autant vous dire qu'il n'a pas passé une très bonne éternité.

Ma position quant au débat sur l'identité nationale est sensiblement la même que celle de Tantale et de son putain d'arbre : j'ai envie d'en cueillir les marrons pour les commenter d'abondance, mais cela m'est refusé par la pénible conscience d'être un mouton guidé par son pâtre sur les chemins herbus de la débilité. Plus clairement : j'ai pas envie de faire plaisir à l'UMP en ventilant à mon tour l'écran de fumée qu'elle diffuse autour des vrais sujets.

MAIS DES FOIS C'EST DUR.

Par exemple, quand Eric Besson déclare (sur Europe 1), réagissant aux propos foireux d'un maire aviné ("y en a déjà dix millions qu'on paie à rien foutre"), que les "réflexions de comptoir" font aussi "partie de l'identité nationale", j'ai plein d'endroits qui me démangent, et pas seulement là où je pense. De deux choses l'une : soit Eric Besson croit ce qu'il dit, et c'est une insulte absolue crachée à nos visages de citoyens français, soit Eric Besson ne croit pas ce qu'il dit, et c'est une pirouette pour légitimer qu'on dise absolument n'importe quoi dans le cadre du "débat" qu'il a lui-même initié et dont il a parait-il fixé des règles strictes.

Dans les deux cas, il ne pousse pas le foutage de gueule jusqu'à feindre la surprise comme d'autres ici ou là ("à droite à gauche" se prêtait mal aux circonstances), du genre "Quoi, mais comment se fait-ce, il y aurait des dérapages racistes à l'intérieur de notre débat qui n'a rien à voir puisqu'il se penche sur l'identité nationale et qu'on a jamais dit que les noirs et les arabes ils étaient pas nationaux aussi".

Phase 1 : je lie (avec pour ficelle un ministère) immigration et identité nationale.
Phase 2 : je lance un débat sur l'identité nationale.
Phase 3 : je m'étonne que le débat porte sur l'immigration. Implacable.

Bon, telle une vierge farouche résistant aux avances libidineuses de bergers en rut, je m'étais promis de ne pas m'étendre, j'en reste donc là : la manoeuvre est grossière, le panneau béant, et ceux qui tombent dedans doivent bien le choisir un peu.

Je terminerai en mentionnant un article lu dans l'irremplaçable Monde Diplomatique qui évoquait les travaux d'Ernest Renan. Ce socio-philosophe du XIXème, qui naviguait avec un bonheur discutable au milieu des thèses racistes de l'époque, darwiniste mais ardent défenseur de la colonisation, chantre des races supérieures/inférieures (cruel portrait, à remettre en perspective avec l'époque, néanmoins), nous a légué l'idée suivante : la nation et la race sont deux notions concurrentes. La construction d'une nation passe donc nécessairement par la négation des races, par leur "dissipation" dans le creuset national. Appartenir à la nation, c'est "la possession en commun d’un riche legs de souvenirs" et surtout "le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis".

Wikipédia mentionne d'ailleurs un extrait évocateur de son "Qu'est-ce-qu'une nation ?"

La vérité est qu'il n'y a pas de race pure et que faire reposer la politique sur l'analyse ethnographique, c'est la faire porter sur une chimère. Les plus nobles pays, l'Angleterre, la France, l'Italie, sont ceux où le sang est le plus mêlé. L'Allemagne fait-elle à cet égard une exception ? Est-elle un pays germanique pur ? Quelle illusion ! Tout le Sud a été gaulois. Tout l'Est, à partir d'Elbe, est slave. Et les parties que l'on prétend réellement pures le sont-elles en effet ? Nous touchons ici à un des problèmes sur lesquels il importe le plus de se faire des idées claires et de prévenir les malentendus

Un texte dont l'écho nous revient par Hamé, rappeur de son état, auteur d'une superbe tribune dans les colonnes du Monde, et qui exprime mon point de vue avec une concision dont je suis bien incapable : Etre français, c'est avoir sa vie en France et rien de plus.

Fermez le ban.

mardi 1 décembre 2009

[Humeur] Dans (Meridor) ton cul

Attention, génie politique.

Dan Meridor est un chic type. Ce n'est pas pour rien qu'il est vice-premier ministre israélien et ministre chargé des services de renseignement et de l'énergie atomique. Un titre un peu long, mais n'en doutons pas mérité. Dan Meridor appartient au Likoud.

Interrogé sur les négociations israëlo-palestiniennes, il explique que celles-ci sont bloquées par les palestiniens qui refusent de faire la moindre concession. Pire, qu'ils refusent celles faites par Israël, en particulier celles faites par Ehud Olmert à l'époque où il était premier ministre. Le journaliste, un peu perplexe, signale alors à Dan qu'Olmert, je le cite, "s'est contenté de propositions verbales, qui ne figuraient sur aucun document". Réponse intégrale, parce que franchement, ça vaut :

Mais pourquoi Mahmoud Abbas n'a-t-il pas dit, verbalement, "Oui, j'accepte" ? C'est quand la réponse est favorable, que l'on peut ensuite traduire cet accord par écrit. Olmert avait tout accordé : un Etat palestinien, des frontières acceptables, des concessions sur Jérusalem et sur la question des réfugiés... Les Palestiniens ont attendu des décennies, ils ont combattu, pour se voir offrir de telles concessions, et Mahmoud Abbas n'a même pas répondu ! Or il n'y a pas de chances que nous revenions aujourd'hui sur ce que Olmert a offert à l'époque.

Après les élections, une nouvelle condition a été avancée par Abou Mazen (surnom de M. Abbas), celle d'un gel total de la colonisation, qui n'avait jamais été formulée auparavant. Au cours des six années qui se sont écoulées depuis la signature de la "feuille de route", en 2003, les constructions n'ont pas cessé, et cela n'a pas empêché Abou Mazen de négocier avec Olmert ! Peut-être les Palestiniens avancent-ils ces pré-conditions parce qu'ils ont peur de signer un accord...

Pas mal hein ? Attends, je résume.

1. Franchement, on est entre potes, on se fait confiance, pourquoi tout écrire ?

2. On vous offrait plein de trucs que vous vouliez, c'est con, parce que maintenant on vous les offre plus.

3. Vous continuiez à négocier alors qu'on ne respectait pas vos demandes. Pourquoi vous voudriez qu'on les respecte maintenant ?

4. J'en déduis que ça ne vous intéresse pas.

Dan Meridor. C'est un pseudo, ça, non ? Je suis sûr que c'est Frederic Lefebvre qui s'amuse.

[Humeur] L'inlucidité

Le soleil brillait sur le palais présidentiel de Tegucigalpa, dissipant ces nuages aussi grisâtres que malvenus en ce jour de triomphe. Monsieur le Ministre de l'Intérieur, je tenais à vous féliciter personnellement pour le succès éclatant de ces élections, le Honduras et la démocratie nous doivent beaucoup et vous n'êtes pas le moindre de ses créanciers. Merci Monsieur Micheletti, et même si vous ne l'êtes plus que pour quelques heures, Monsieur le Président. La situation fut gérée de main de maître et je dois reconnaître que votre sens politique brillant n'est pas pour rien dans l'excellent résultat d'aujourd'hui. Rappelez-moi, Monsieur le Ministre, les scores de nos amis Lobo et Santos. 55% pour Lobo du Parti National et 37% pour Santos du Parti Liberal. Anita, veuillez prendre en note : insister sur l'écart entre les deux candidats, et bien faire figurer les scores des candidats de gauche en grossissant l'échelle. Merci de faxer cette note aux directeurs des chaînes de télévision. Monsieur le Ministre, nous parlions chiffres, quelle est la participation ? Nous ne disposons pas encore des éléments définitifs, Monsieur , seulement d'estimations. Mais encore, dites, quelle est la tendance. Monsieur, s'empourpra le Ministre de l'Intérieur, nous n'avons aucune certitude sur la fiabilité de ces estimations, je recommande à votre Excellence de patienter jusqu'à ce que mes services aient recoupés les chiffres des différentes régions. Ne faites pas l'imbécile, dites-moi tout de suite ce que je vous demande avant que je ne sollicite un de vos collègues qui se montrera certainement plus diligent. Monsieur, ne le prenez pas sur ce ton, je souhaitais simplement vous préserver d'un souci négligeable en cette belle soirée électorale. Mes services faisaient état, il y a quelques minutes, d'une participation, mais je doute que soient pris en compte les régions du Nord, qui sont comme vous le savez toutes acquises à nos candidats, et qui ne manqueront pas d'élever le chiffre de 35% que nous obtenons pour l'instant. Monsieur, il est inconcevable que ce chiffre s'ébruite. Je vous demande un chiffre de 70%, peu ou prou, et je compte sur votre efficacité pour qu'il soit entouré de toute l'exactitude requise avant d'être communiqué aux médias et observateurs internationaux. Je serai peiné de constater votre incompétence alors que je n'ai guère d'erreurs à vous reprocher jusqu'ici. Bien Monsieur le Président, je vous demande de m'excuser de prendre congé aussi soudainement, mais je dois d'urgence contacter les préfets pour passer mes consignes et vous agréer, vous avez ma parole que la situation sera comme vous l'avez décrite d'ici minuit ce soir. Bien, je compte sur vous.

Le regard absorbé par le trafic intense du Boulevard Miraflores, le Président faisait l'inventaire des actions à entreprendre pour que la situation reste sous contrôle. Recommander au récent vainqueur de constituer un gouvernement d'union nationale, d'y intégrer Santos, quelques ministres en exercice, et offrir un maroquin de seconde zone à Zelaya. La culture, ou peut-être les transports. Il refusera, et ils pourraient tourner cela comme un refus du compromis et lui imputer, à lui et à son irresponsable rigidité, la responsabilité des évènements passés et à venir. Tout s'était déroulé comme prévu avec Zélaya, comme toujours avec ces abrutis de chavistes. Pourtant, quelques heures après sa destitution et son expulsion du pays, la précarité de la situation n'échappait à personne, et il avait fallu redoubler d'effort pour ne pas réduire à néant des mois de travail, et se discréditer auprès des grands industriels qui lui avait fait confiance. En particulier, les pressions de l'OEA et de ce connard de Chavez avaient failli réussir et imposer la restitution des pouvoirs au chef de l'Etat déchu, de jure qu'il disait dans les médias européens. Roberto de facto Michelleti avait pourtant fini par l'emporter.

Le téléphone sonna, sa secrétaire pris l'appel puis d'un air pénetré lui confia qu'il s'agissait de l'émissaire américain. Monsieur Shannon, énonca-t-il en prenant le combiné des mains d'Anita, quel bonheur. Que puis-je pour vous ? Je tenais à vous féliciter pour le succès de ces élections, dit l'émissaire américain d'un ton enjoué, et vous rappeler que les Etats-Unis d'Amérique appuieraient le gouvernement à venir de toute leurs forces. D'incommensurables forces que les vôtres, monsieur Shannon, et nous n'oublions pas que c'est votre amitié et votre détermination qui ont permis de rétablir le bon droit au Honduras. Nous vous devons notre liberté retrouvée, et c'est une dette qui ne s'oublie pas. Monsieur Micheletti, les ennemis de nos ennemis sont nos amis, et c'est un lien bien plus fort qu'une amitié de circonstances. Le communisme a reculé sous les coups de nos efforts conjoints, et je peux vous assurer que le Département d'Etat partage mon enthousiasme pour la période de prospérité et d'échange qui s'offre à nous désormais. J'espère vous reparler bientôt, à vous ainsi qu'à monsieur Lobo, de cette histoire de soja dont nous avions déjà discuté il y a quelques mois. Avec plaisir monsieur Shannon, nous vous recontacterons dès le gouvernement formé. Il raccrocha et son sourire s'effaça.

Les américains étaient des alliés gourmands, mais leur fidélité quand l'ONU et les instances internationales leur avaient tournés le dos s'était avérée indispensable. Sans leurs efforts diplomatiques, et sans leur parrainage, jamais l'accord de San José-Tegucigalpa n'aurait pu être signé. Zelaya avait fait preuve d'une confondante naïveté, et leur avait offert un blanc-seing parfait pour organiser les élections à leur guise. C'était le ministre de la Justice qui avait eu l'idée de proposer son retour au pouvoir, en posant comme unique condition la tenue d'une consultation du Congrès. Zelaya, ravi de voir son exigence principale acceptée sans discussion, ne s'était enquis d'aucune feuille de route ni d'aucun détail sur cette consultation, de telle sorte qu'ils avaient pu laisser trainer, avec la bienveillance des Yankis, jusqu'à l'élection et le triomphe d'aujourd'hui. La cour suprême, qui avait de toute façon invalidé la restitution de Zelaya, n'avait même pas eu besoin de monter au créneau puisque le Congrès ne s'était pas réuni. Il faudrait penser à surveiller le ministre de la Justice. Et le ministre de l'intérieur aussi, d'ailleurs. Celui-ci avait quant à lui suggérer la constitution d'un gouvernement d'Union Nationale. L'union, l'unité, la réconciliation étaient des notions fort côtées à l'étranger, et leur simple mention apaisait en général les vélléités de sanction de la part des démocraties mal lunées qui leur avaient fait des difficultés au début. En guise d'union nationale, il avait constitué, et c'était une gageure de le faire passer, un gouvernement sans le moindre ministre ni partisan de Zelaya. Une gageure. Un succès. Il aurait donné cher pour avoir cette merde en face de lui. Reclus dans son ambassade en état de siège, agitant ses petits bras impuissants alors qu'il décidait, lui, de la destinée hondurienne depuis cinq mois et qu'il allait laissé à Lobo un pays pacifié, apaisé, le golpe oublié et les affaires en marche.

20h. Les journalistes allaient bientôt arriver pour son allocution, préparée depuis des jours. Il avait laissé un blanc là où le nom du candidat devait apparaître, Lobo, Santos, quelle importance. Il essaya d'imaginer un instant les questions des journalistes. Monsieur le Président, pouvez-vous justifier la présence de soldats dans les bureaux de vote ? Monsieur le Président, que pensez-vous des rumeurs d'abstention massive évoquées dans le pays ? Monsieur le Président, la tenue de cette élection sous le contrôle de votre gouvernement n'est-elle pas en contradiction avec les accords signés fin octobre avec monsieur Zelaya ? Monsieur le Président, quelles sont vos relations avec le Département d'Etat américain ? Foutaises. Les seuls crétins qui auraient osé lui poser ces questions étaient en résidence surveillée et leurs journaux étaient fermés. On allait lui parler d'apaisement, de retour au fonctionnement normal des institutions, de victoire du peuple et de la démocratie, on allait solliciter son interprétation des bons résultats du Parti National, et sur la défaite de son parti. Il dirait qu'il était normal que le peuple se tourne vers un parti moins divisé, et que le parti Liberal payait les incohérences du gouvernement précédent et la situation de ces derniers mois que la population avait désavoués, dans un refus unanime des réformes socialistes pilotées par le Venezuela contre la souveraineté du Honduras. Il remercierait les observateurs internationaux et les émissaires étrangers pour leur aide et leur soutien, il tendrait la main aux partisans de Zelaya en s'appuyant sur la voix du peuple qui était limpide et en souhaitant bonne chance à Monsieur Porfirio Lobo, qui aurait beaucoup de travail mais qu'il estimait beaucoup.

Le téléphone sonna à nouveau. La télé, certainement. Il décrocha. Monsieur le Président. Monsieur le Ministre, comment vont nos affaires étrangères ? Mal, je le crains, Monsieur, le Quai d'Orsay ne reconnaît pas les résultats de l'élection d'aujourd'hui. Le Quai quoi ?

Sources :
Le Monde Diplomatique
Le Figaro
Le Monde

PS : "La gauche reconnaît la victoire de Porfirio Lobo", titre le Figaro. La gauche = le parti libéral = le parti de Roberto Micheletti. Of course.

[VNR] C'Tarnac

Hier, je me suis infligé pour la seconde fois en quelques jours, et pour des raisons qui m'échappent encore, le journal de 20h de Laurence Ferrari. Pas tout, soyons honnêtes, juste le temps de m'immerger avec le vaillant auteur du sujet dans le noir quotidien des "autonomes", nouvelle mutation sémantique des gauchistes énervés également connus sous les noms d'Ultragauche, de Mouvance Anarcho-Autonome, etc...

Le reportage s'attachait tout d'abord aux pas de Pascal, un mec avec le crâne rasé et qui, nous dit le journaliste, "a déjà fait plusieurs fois de la prison pour dégradation". Interviewé, Pascal expliquera, sur fond de ZIM (Zone Industrielle Moche), que "le capitalisme c'est partout, donc on ne peut que l'affronter de façon violente".

Transition (habile) : des images de mecs cagoulés de noir qui caillassent des banques ou des flics, commentaire dramatique sur "ces black-blocks, notamment vus à Strasbourg lors du sommet de l'Otan" qui sont mystérieux et dangereux. Interview d'un mec en cagoule qui explique que c'est pas de la violence aveugle, ils caillassent que des banques ou des symboles de l'oppression capitaliste. Intervention de la voix off qui explique que la police dénombre 500 membres de black-blocks en France, mais qu'ils ont l'air vachement plus nombreux (alors que quand il y en a un, ça va).

Juxtaposition : histoire de l'activisme violent, Action Directe, images d'archives avec des gens qui meurent.

Nouvelle juxtaposition : "A Tarnac, par exemple, des jeunes gens organisés en groupuscule sont poursuivis pour sabotage de chemin de fer".

Conclusion rapide sur ces mouvements violents qui composent le paysage de la gauche non-institutionnelle. Retour à Laurence Ferrari qui enchaîne sur Noël qui est déjà là dans je ne sais plus quelle ville danoise.

Deux remarques :
1- faire un sujet sur ce nouveau marronier journalistique qu'est l'extrême gauche "violente" en ne mentionnant de Tarnac que la version d'il y a six mois, c'est à dire sans faire état de la violente remise en cause des enquêteurs et des témoins entendus, c'est beau.
2- balancer au 20h du cagoulé qui fait peur, entre deux tranches de bonheur pré-Noël, c'est évidemment un choix anodin.

Merci TF1.

Je profite de l'occasion pour signaler à l'éventuel pigiste qui serait tombé sur cet article en tapant "black-block" "peur" sur Google pour préparer son prochain sujet qu'il pourrait, histoire de changer un peu, se pencher sur ce qu'il se passe au Honduras, où dans un mépris absolu des règles démocratiques et des accords diplomatiques signés, l'opposition de jure (mais au pouvoir de facto) vient de remporter des élections présidentielles pitresques au point que même notre gentil Quai d'Orsay, pas tellement prompt à la condamnation sud-américaine, les désavoue.

C'est plus dur à résumer à Roger et Simone que les caillassages de boutiques par d'effrayants autonomes, mais rassure-toi, si ça continue, les images ne vont pas tarder à être aussi vendeuses.

[Polésie] Fakirmess

Comme tu as pu le constater, et depuis que la RATP m'a ouvert les yeux et décomplexé le complexe grâce aux très beaux poèmes placardés dans ses rames, je me lance à mon tour dans la polésie.

Luz, allume les larmes de l'onire.
Loose, allonge le livre de lire.
Luce, prends des chips et un kir.
Roger, la même chose !

Le fakir s'égare, il n'est plus dans les clous
Et du turban s'échappent ses pensées légères
Serpents agités par les flûtes du vent
Et par la foule avide de scandale et de sang
Que ne suis-je occident pour me trouver trouvère ?
Le fakir devient fou.

Ses vers, sévères, s'avèrent si verts.
Ton ton tonton est tant tentant.
Pilipilipilipili.

Ce blog étant respectueux des normes littéraires internationales, toute polésie apparaîtra désormais en italique.